Les électrochocs (ou sismothérapie) efficaces contre le risque de suicide ? Cette équipe du Collège médical de Géorgie à l'Université Augusta (Géorgie) suggère en effet, avec cette petite étude pilote présentée dans la revue Brain Sciences, qu'à la moitié de l'amplitude généralement utilisée, le traitement électroconvulsif (ECT) pourrait être efficace pour traiter les pensées suicidaires.
Les décès par suicide sont en augmentation. Les épisodes dépressifs, qu’ils fassent partie d’un trouble dépressif majeur, d’un trouble bipolaire ou d’un trouble schizo-affectif, constituent un facteur de risque majeur de suicide, en particulier chez les personnes souffrant de dépression résistante aux traitements, soit environ un tiers des patients dépressifs. Il existe déjà des preuves d’efficacité des électrochocs contre la dépression. Les auteurs citent l’étude multicentrique PRIDE, financée par les National Institutes of Health (NIH) qui suggère une utilisation plus large de l’ECT pour maintenir en rémission davantage de patients souffrant de dépression majeure. Outre la stigmatisation associée aux électrochocs, la réticence des patients et leurs familles pour ce traitement, une autre raison pour laquelle les électrochocs ne sont pas plus largement utilisés dans les cas de dépression ou de pensées suicidaires est l’inquiétude suscitée par l’impact sur la cognition, un des principaux effets secondaires des électrochocs à amplitude standard, expliquent les chercheurs.
Des électrochocs à faible courant pour chasser les pensées suicidaires
L'étude, randomisée, est la première à s'intéresser aux électrochocs pour chasser les pensées suividaires. elle est menée auprès de 7 patients, dont 3 traités par ECT de faible amplitude à 500 milliampères et 4 par ECT d’amplitude standard de 900 milliampères.
Il est clair que l’ECT de faible amplitude entraîne moins d'effets cognitifs secondaires, en particulier sur la mémoire, que l'ECT d'amplitude standard. Cependant, l'étude montre que des résultats cliniques très concluants :
- Les patients ayant reçu un ECT de faible intensité s’avèrent soulagés de leurs pensées suicidaires dès la 3è séance alors que 4 séances d’amplitude standard sont nécessaires pour obtenir le même résultat ;
- les patients ayant subi l’ECT de faible amplitude se remettent de leur traitement en quelques minutes, alors que 15 minutes environ sont nécessaires avec l’ECT standard. Or ce temps de récupération est un facteur prédictif positif d’absence d’effets cognitifs secondaires du traitement. L’ECT de faible amplitude ne semble entraîner en effet aucun effet indésirable sur la mémoire ou la cognition.
- les patients ayant subi l’ECT de faible amplitude semblent également obtenir un meilleur soulagement de leurs pensées suicidaires, avec des scores plus élevés du début à la fin du traitement vs ECT standard (5.1 vs à 3.0 sur une échelle de 10 items mesurant la sévérité de la dépression et des pensées suicidaires).
Les zones cérébrales « de la dépression » sont plus superficielles que celles de la cognition : De nombreux centres de dépression dans le cerveau sont plus superficiels que les centres de la mémoire, ce qui explique qu'une amplitude supérieure n'est pas nécessaire pour atteindre « les zones de la dépression ». Une amplitude plus faible épargne donc les zones impliquées dans la mémoire. Ces résultats, prometteurs, vont servir de base à un essai multicentrique comparant les approches sur un plus grand nombre de patients avec l’objectif de suivre les patients sur une période plus longue. « Nous allons mener de plus grandes études avec plus de patients car cette approche semble très prometteuse », commente l’auteur principal, Dr. Nagy A. Youssef, psychiatre, expert en ECT à l’Augusta University et qui, au cours des 10 dernières années, a effectué l'une des premières recherches sur les électrochocs à faible amplitude sur des modèles animaux.
Mieux comprendre les effets de l’ECT : Même si on ne comprend pas bien comment les électrochocs agissent en tant qu'antidépresseurs et antipsychotiques, leur effet est comparé à celui d’un choc électrique qui peut faire redémarrer un cœur et rétablir son rythme. Ici, les patients avaient essayé plusieurs médicaments et psychothérapies sans succès et ce traitement de courte durée a permis de faire cesser un épisode psychotique ou dépressif sévère.
Néanmoins l’ECT n’est pas sans effet secondaire. Le traitement induit des crises convulsives et tous les patients de la présente étude ont effectivement présenté ces crises convulsives de faible amplitude, plutôt de courte durée, sous anesthésie et sous contrôle médical.
Source : Brain Sciences 29 April 2019 DOI : 10.3390/brainsci9050099 Magnitude of Reduction and Speed of Remission of Suicidality for Low Amplitude Seizure Therapy (LAP-ST) Compared to Standard Right Unilateral Electroconvulsive Therapy: A Pilot Double-Blinded Randomized Clinical Trial
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