C’est une « drôle » d’association, découverte par cette équipe de l'Université de Chicago : les patients atteints d'une maladie cérébrale hémorragique présentent aussi des microbiomes intestinaux très désordonnés. Ces travaux présentés dans la revue Nature Communications nous apportent une nouvelle illustration de cet axe intestin-cerveau, jusque-là principalement mis en lumière dans les maladies neurologiques. L'étude entraîne des implications pour le traitement de l'angiome caverneux, une malformation vasculaire rare localisée dans le cerveau, mais probablement aussi pour d’autres conditions hémorragiques cérébrales.
Précisément, l’étude montre que les patients atteints de cette maladie génétique rare qui provoque des saignements dans le cerveau, ont également des microbiomes intestinaux bien distincts. La maladie en question, l'angiome caverneux, est caractérisée par des anomalies des vaisseaux sanguins dans le cerveau, la survenue d’accidents vasculaires cérébraux, de convulsions et de graves complications neurologiques. La maladie est causée par une mutation génétique de la lésion – qui peut être héréditaire ou se produire sporadiquement – et sa gravité et son évolution varient considérablement d'un patient à l'autre.Et ce sont les molécules produites par ce déséquilibre bactérien qui provoquent la formation de lésions dans le cerveau de ces patients. L’étude suggère ainsi une relation directe entre ce grand « désordre intestinal » et la condition cérébrale.
C’est la première association entre le microbiome intestinal et une maladie neurovasculaire humaine
Avec des implications pour toutes les maladies neurovasculaires qui pourraient être affectées, à l’identique, par un microbiome intestinal « anormal », soulignent l’équipe de Chicago, experte internationale de la maladie et connue dans le monde entier. Ces derniers ont examiné les bactéries intestinales des patients atteints d'angiome caverneux. Pourquoi ? L'auteur principal, le Dr Issam Awad, Chef de service de chirurgie neurovasculaire à l’UChicago Medicine avait participé à une précédente étude sur des souris, qui avait montré que les cellules qui tapissaient les vaisseaux sanguins du cerveau réagissent aux bactéries intestinales.
Un microbiome peut-il favoriser le développement de lésions cérébrales ? Ce qui avait été démontré chez la souris, s’avère en effet également le cas chez ces patients atteints d’angiome caverneux. L’analyse d’échantillons de selles prélevés chez de plus de 120 patients atteints d’angiome caverneux et comparés à des échantillons de témoins sains, montre des quantités significativement plus élevées de bactéries gram-négatives et significativement moins élevées de bactéries gram-positives.
Une combinaison de 3 espèces bactériennes distingue les patients à angiome cérébral
En substance, l’analyse identifie chez ces patients une communauté bactérienne « très perturbée » : « Les patients atteints d’angiome cérébral présentent tous le même microbiome distinctif, qu'ils aient hérité de la mutation ou qu'ils aient développé une lésion sporadique. Ce déséquilibre bactérien produit des molécules de lipopolysaccharides (LPS), qui voyagent via le sang vers le cerveau et se fixent à la paroi des vaisseaux sanguins du cerveau, entraînant le développement de lésions »
Le microbiome est une cause de lésions plutôt qu'un effet,
concluent les chercheurs.
« En examinant à la fois les combinaisons de bactéries et les biomarqueurs sanguins, nous sommes capables d’évaluer la sévérité de la maladie chez chaque patient ».
Les chercheurs étudient également si cette connexion microbiome-cerveau peut être généralisée dans d'autres maladies. D’autant qu’ils identifient les mêmes gènes et biomarqueurs impliqués dans l’angiome cérébral, dans le cerveau humain des personnes très âgées…
Source : Nature Communications 27 May 2020 Permissive microbiome characterizes human subjects with a neurovascular disease cavernous angioma
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