La protéine SARS-CoV-2, responsable du COVID-19 interagit avec la protéine apha-synucléine caractéristique de la maladie de Parkinson, et cette interaction « booste » la formation de fibrilles amyloïde toxiques. En décryptant ce processus pathogénique, cette équipe de biologistes de l’Université de Twente (Pays-Bas) révèle pour la première fois un lien critique entre Parkinson et COVID, avec des implications importantes en termes de prévention et de surveillance.
Cette recherche contribue à expliquer des rapports de cas de patients COVID-19 relativement jeunes ayant développé la maladie de Parkinson quelques semaines après avoir contracté le virus. Ces cas ont conduit les scientifiques à se demander s'il pourrait y avoir un lien entre les 2 conditions. Ces chercheurs montrent, in vitro, que la protéine N du SRAS-CoV-2 interagit avec la protéine neuronale α-synucléine et que cette interaction accélère la formation de fibrilles amyloïdes toxiques, impliquées dans la maladie de Parkinson.
Une explication aux problèmes neurologiques observés avec COVID-19 ?
- En plus des symptômes respiratoires, le SRAS-CoV-2 peut en effet entraîner des troubles neurologiques, avec des symptômes du type perte d'odorat, maux de tête ou encore brouillard cérébral. Cependant, la question de savoir si ces symptômes sont causés par le virus directement, par une inflammation, ou encore des signaux chimiques libérés dans le cerveau par le système immunitaire en réponse au virus reste discutée.
- Dans la maladie de Parkinson, la protéine α-synucléine forme des fibrilles amyloïdes anormales, qui induisent la mort des neurones producteurs de dopamine dans le cerveau. Les auteurs relèvent que, d’ailleurs, la perte de l'odorat est un symptôme précoce courant dans la maladie de Parkinson.
Des protéines de coronavirus en cause dans ces troubles neurologiques ? L’équipe s’est donc demandé si les composants protéiques du SRAS-CoV-2 pouvaient être en cause dans le déclenchement de ce processus d’agrégation de l’α-synucléine en amyloïde. Les chercheurs se sont concentrés sur les 2 protéines les plus abondantes du virus : la protéine de pointe (S) qui aide le SRAS-CoV-2 à pénétrer dans les cellules hôtes et la protéine de nucléocapside (N) qui encapsule le génome d'ARN à l'intérieur du virus.
- In vitro, les scientifiques montrent qu'en l'absence des protéines du coronavirus, l’α-synucléine met plus de 240 heures à s'agréger en fibrilles ;
- l'ajout de protéine S n'a aucun effet ;
- l’ajout de protéine N en revanche réduit le temps d'agrégation à moins de 24 heure ;
- les protéines N et α-synucléine interagissent notamment via leurs charges électrostatiques opposées, avec au moins 3 à 4 copies d'α-synucléine liées à chaque protéine N ;
- enfin, l’injection de protéine N et d'α-synucléine marquée par fluorescence chez un modèle cellulaire de maladie de Parkinson, induit la mort de 2 fois plus de cellules qu’en cas d’injection d’α-synucléine seule ;
- la distribution d’α-synucléine se trouve altérée dans les cellules des modèles ayant reçu les 2 protéines, la structure de l’α-synucléine est allongée, au point que la protéine devient difficilement reconnaissable ;
Ces données expérimentales soutiennent pour la première fois un lien possible entre l'infection au COVID-19 et la maladie de Parkinson, avec des implications, si ce lien était confirmé par des études, épidémiologiques, chez l’Homme.
Source: ACS Chemical Neuroscience 3 Dec, 2021 DOI : 10.1021/acschemneuro.1c00666 Interactions between SARS-CoV-2 N-Protein and α-Synuclein Accelerate Amyloid Formation