Ces chercheurs toxicologues, pédiatres et urgentistes de l’Université de Virginie, décrivent ici « une crise de santé mentale sans précédent dans les groupes d'âge plus jeunes ». L'étude, publiée dans la revue Clinical Toxicology révèle une hausse de 27 % des tentatives de suicide (TS) par empoisonnement chez les enfants -américains- entre 2015 et 2020. Ces données alarmantes, qui incluent l’effet « pandémie » appellent nos sociétés à consacrer plus de ressources aux besoins de santé mentale et au bien-être de nos enfants et de nos jeunes.
Si plusieurs études ont décrit l’aggravation de la prévalence des symptômes dépressifs chez les jeunes, en particulier depuis la pandémie COVID et les mesures de distanciation sociale, cette recherche jette, avec l’analyse épidémiologique des TS par empoisonnement, un nouvel éclairage sur la crise de la santé mentale pédiatrique et chez les jeunes adultes.
La hausse du suicide chez les jeunes, un phénomène « national », voire au-delà
Les TS par empoisonnement chez les enfants et jeunes ont augmenté de 27 % en 5 ans, conclut cette analyse des signalements effectués au National Poison Data System en tant que « suicides présumés », qui comprennent à la fois les TS et les décès par suicide :
- L'incidence des suspicions de suicide par auto-intoxication atteint 93.532 en 2020 vs 75.248 en 2015 ;
- les filles sont les premières victimes : elles représentent 78 % des cas d'auto-intoxication de la tranche d’âge sur la période d’étude ;
- cette augmentation est d’autant plus spectaculaire que le nombre total d'appels aux centres antipoison a diminué ;
- si tous les groupes d'âge pédiatrique ont connu une augmentation des TS, la plus forte augmentation du taux de suicides s'est produite dans la tranche d’âge 10 à 12 ans, avec une croissance de 109,3 % entre 2015 et 2020, ce qui est un résultat plus que préoccupant.
« En tant que cliniciens, nous avons commencé à remarquer une augmentation du nombre d'enfants plus jeunes tentant de se suicider par surdose aiguë dans notre pratique clinique à l’UVA Health », commente l’un des auteurs principaux, le Dr Christopher Holstege, directeur médical du Blue Ridge Poison Center et chef de la division de toxicologie médicale de l'Université de Virginie : « nous avons alors décidé d'effectuer des recherches sur les données nationales qui confirment que cette augmentation n'est pas un problème local, mais un phénomène national, voire au-delà ».
Quels « poisons » ? Les 2 substances les plus couramment impliquées dans les intoxications suicidaires chez les enfants et les jeunes sont l'acétaminophène et l'ibuprofène, 2 analgésiques en vente libre et auxquels chacun a facilement accès. Les auto-intoxications signalées comprenaient 276 décès et 14.916 cas d '«effets majeurs», avec des symptômes pouvant être mortels ou conduire à une invalidité ou une incapacité de longue durée.
« L’augmentation des cas d'auto-intoxication est très préoccupante parmi tous les groupes d’âge de de 6 à 19 ans et suggère que les jeunes traversent une vraie crise de santé mentale ». Ces auteurs appellent à des évaluations, des détections de ce risque de TS chez les jeunes ainsi qu’à des interventions en santé mentale plus accessibles.
« Notre étude est l'une des nombreuses qui démontrent que nous vivons une véritable crise de santé mentale, sans précédent, dans les groupes d'âge plus jeunes. En tant que société, nous devons consacrer plus de ressources aux besoins de santé mentale de nos enfants ».
Un effet collatéral de l’isolement social imposé aux jeunes ? C’es plus que probable.
Source: Clinical Toxicology Mar 2022 DOI: 10.1080/15563650.2022.2042013 Pediatric suicides reported to U.S. poison centers
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