« Perdre ses dents, c’est perdre un peu la tête », avait écrit une équipe de l’Université de New York. Une mauvaise santé buccodentaire peut contribuer au déclin cérébral et cognitif, réitère cette équipe de l’Université Yale (New Haven, Connecticut). L’étude, présentée lors de l’American Stroke Association International Stroke Conference 2023 confirme 2 principes : les personnes génétiquement prédisposées à une moins bonne santé buccodentaire sont aussi plus susceptibles de montrer des signes de déclin de la santé cérébrale et cognitive, mais la prise en charge précoce des problèmes de santé buccodentaire apporte bien des bénéfices importants au cerveau.
Santé buccodentaire, cardiaque et cognitive sont définitivement de plus en plus étroitement liées au fil des études qui révèlent l’association entre le microbiome oral et l’hypertension et plus largement la santé buccodentaire et la maladie cardiaque, la maladie artérielle, et l’AVC ou la santé cérébrovasculaire.
Prendre soin de ses dents et de ses gencives offre des avantages au-delà de la santé buccodentaire
L’auteur principal, le Dr Cyprien Rivier, chercheur en neurologie à la Yale School of Medicine précise que « ce qui n'est pas clair, c'est si une mauvaise santé bucco-dentaire affecte la santé du cerveau, c'est-à-dire l'état fonctionnel du cerveau. Les outils de neuroimagerie tels que l'IRM permettent aujourd’hui d’en avoir le cœur net. Et si l’impact de la santé buccodentaire est confirmé, il faut rappeler que c’est un facteur fréquent mais qui reste un facteur de risque facilement modifiable ».
La santé buccodentaire tend aujourd’hui à faire partie des facteurs d’un mode de vie sain, au même titre que l’alimentation et la pratique de l’exercice, avec des conséquences, en particulier sur le risque de maladie cardiaque et d’AVC ou autres événements cérébrovasculaires.
L’étude analyse ainsi le lien possible entre la santé buccodentaire et la santé du cerveau chez 40.000 participants à la U.K. Biobank, âgés en moyenne de 57 ans et sans antécédents d'AVC. Les participants ont été dépistés pour 105 variantes génétiques de prédisposition aux caries, à la perte de dents, à la nécessité de prothèses dentaires. Les chercheurs ont ensuite évalué la relation entre ces facteurs de risque génétiques de mauvaise santé buccodentaire et la santé du cerveau. Les signes de mauvaise santé cérébrale ont été détectés via IRM. L’analyse conclut que :
- les participants génétiquement prédisposés aux caries, à la perte de dents et autres priblèmes buccodentaires encourent un risque ultérieur accru de maladie cérébrovasculaire silencieuse, telle qu’illustrée par une augmentation de 24 % de la quantité d'hyperintensités de la substance blanche visibles à l’IRM ;
- les participants génétiquement prédisposés à une mauvaise santé buccodentaire présentent des dommages accrus à l'architecture fine du cerveau, illustrés par un changement de 43% des scores de dommages microstructuraux visibles à l’IRM.
Une mauvaise santé buccodentaire peut donc favoriser la détérioration de la santé du cerveau : « nous devons donc faire très attention à notre hygiène buccodentaire car elle a des implications bien au-delà de la bouche ».
Ainsi, certains facteurs environnementaux tels que le tabagisme et le diabète, des facteurs de risque pour la santé buccodentaire ont également un impact majeur sur la santé cérébrale.
Il reste cependant impossible de démontrer la relation de cause à effet. Les modèles génétiques associés à une vulnérabilité buccodentaire peuvent chevaucher les modèles génétiques de risque d'autres problèmes de santé chroniques comme le diabète, l'hypertension, les accidents vasculaires cérébraux, les infections, etc…
On retiendra néanmoins que veiller à une bonne hygiène et santé buccodentaires, c’est aussi protéger son cerveau.
Source: American Stroke Association International Stroke Conference 2023, 2 Feb, 2023 – Abstract 126 Poor oral health may contribute to declines in brain health