Cette étude révolutionnaire menés par des neuroscientifiques et généticiens de l’Université de Californie – Los Angeles relie le risque génétique d'autisme à des changements spécifiques observés dans le cerveau, marquant ainsi une étape dans la cartographie génétique de la maladie dans le cerveau. Ces travaux, publiés dans la revue Science, offrent l’image la plus précise à ce jour, des mécanismes biologiques complexes sous-jacents et révèlent de nouveaux marqueurs d'activité cellulaire et génétique de l’autisme.
La recherche est menée dans le cadre d’un programme soutenu par les National Institutes of Health, PsychENCODE. Lancé en 2015, cette initiative, dirigée par le Dr Daniel Geschwind, neurogénéticien de l'UCLA, a pour objectif de développer des cartes de la régulation génétique dans les différentes régions du cerveau et à différents stades du développement cérébral. Les dérégulations pouvant être ensuite associées au risque génétique de différents troubles psychiatriques et aux mécanismes causals au niveau moléculaire qui peuvent expliquer leur développement.
L’étude se concentre ici sur l’autisme et s’appuie sur des décennies de recherche de l’équipe sur les gènes qui augmentent la susceptibilité aux troubles du spectre autistique (TSA) et sur les changements moléculaires observés dans le cerveau des personnes autistes. L’équipe décrypte les causes de ces changements moléculaires et leur lien avec la susceptibilité génétique.
Le profilage génétique des TSA s'est jusque-là majoritairement limité à l'analyse d’échantillons de tissus en vrac provenant du cerveau d'individus autistes après leur décès. Ces études tissulaires ne peuvent pas fournir certaines informations détaillées telles que les différences dans la couche cérébrale, le niveau des circuits neuronaux ou encore les voies associées à l'autisme spécifiques au type de cellule ou les mécanismes de régulation des gènes.
Les dernières techniques d’analyse unicellulaire ont permis ici d'extraire et d'identifier l'information génétique dans les noyaux de cellules individuelles. Plus de 800.000 noyaux ont ainsi été isolés des échantillons de tissu cérébral post mortem de 66 individus âgés de 2 à 60 ans, dont 33 participants atteints de TSA et 30 participants neurotypiques. Parmi les participants autistes, 5 présentaient une forme génétique d’autisme appelée syndrome de duplication 15q (ou syndrome Dup15q). Finalement, la recherche a permis d’identifier :
- les principaux types de cellules corticales touchées par les TSA, qui comprenaient à la fois les neurones et leurs cellules de soutien, appelées cellules gliales ;
- les changements les plus profonds dans les neurones qui relient les 2 hémisphères et assurent une connectivité à longue portée entre différentes régions du cerveau et un groupe d’interneurones, appelés interneurones à somatostatine, qui sont importants pour la maturation et la précision des circuits cérébraux ;
- des réseaux de facteurs de transcription spécifiques –réseaux d’interactions par lequel les protéines contrôlent le moment où un gène est exprimé ou inhibé –à l’origine des changements observés : « remarquablement », ces facteurs apparaissent enrichis en gènes de risque déjà connus de TSA et influencent certains des changements observés dans des sous-types de cellules spécifiques.
C'est le premier mécanisme identifié, reliant directement les changements cérébraux associés aux TSA à des causes génétiques sous-jacentes.
« Comprendre les changements moléculaires complexes qui se produisent dans le cerveau des personnes atteintes de TSA, dans quels types de cellules ils se produisent et comment ils impactent les circuits cérébraux » ouvre l'espoir de traitements plus efficaces à traiter ces troubles « à la source ».
Source: Science 23 May, 2024 Science DOI: 10.1126/science.adh2602 Molecular cascades and cell type – specific signatures in ASD revealed by single-cell genomics
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