En cas de conflit, quels sont les processus neuronaux sous-jacents au désir de vengeance ? Cette recherche d’une équipe de l’Université de Pékin, publiée dans la revue eLife, implique à nouveau l’hormone ocytocine ou « hormone de l'amour » dans ce comportement ! Les conclusions de l’étude contribuent également à expliquer la « contagion du conflit » ou comment un conflit naissant entre quelques individus finit par se propager à des groupes entiers.
On pourrait être surpris par cette implication de l’hormone ocytocine dans les situations de conflit. Cependant les niveaux de l’hormone augmentent pendant les conflits entre groupes et l’hormone envoie son signal au cortex préfrontal médian, la zone du cerveau associée à la prise de décision. Le sentiment d'amour et d'empathie grandit au sein du groupe et, simultanément son désir de vengeance en cas d’attaque d’un groupe extérieur. Ce rôle « rassembleur » déjà documenté de l’ocytocine contribue aussi à expliquer la propagation du souhait de vengeance à l’ensemble du groupe.
Le désir de vengeance est universel et contagieux
« Le désir de se venger pendant un conflit est universel chez l'humain, mais les processus neurobiologiques qui conduisent à la vengeance restent mal compris », explique l'auteur principal Xiaochun Han, docteur en psychologie et en neuroscience à l’Université de Pékin. En travaillant à partir de précédentes recherches, son équipe a émis l’hypothèse qu'il pouvait y avoir un mécanisme neurobiologique sous-jacent faisant le lien entre la douleur ressentie au sein d'un groupe et le désir de se venger du groupe qui la cause.
Le rôle clé de l’ocytocine : Pour explorer davantage ce mécanisme, l'équipe a mis en œuvre une expérience neuro-comportementale qui simule la vengeance lors d'un conflit entre groupes, dans la vraie vie. Comme l'ocytocine est connue pour jouer un rôle dans l'empathie et dans la résolution des conflits, les chercheurs se sont concentrés sur l'ocytocine et les réponses neuronales à la souffrance infligée par un groupe externe. Au cours de l'expérience, les participants étaient invités à regarder un membre de leur groupe recevoir un choc électrique infligé par un membre de l’autre groupe (pour le groupe « vengeance ») ou par un ordinateur (pour le groupe « contrôle »). Les participants ont ensuite été évalués par une IRMf et la mesure des niveaux d'ocytocine. L’analyse montre que :
- les participants du groupe « vengeance » présentent une augmentation du niveau d'ocytocine par rapport au groupe témoin ;
- ces niveaux accrus d'ocytocine prédisent l'activité préfrontale médiale associée à la douleur partagée au sein du groupe ;
- cette activité cérébrale est directement corrélée au désir de se venger du groupe extérieur, que l’on soit directement ou pas impliqué dans le conflit.
L’expérience décrypte comment une souffrance infligée à un membre du groupe peut inciter un membre du groupe non impliqué à se venger. Elle met ainsi en lumière le processus neurobiologique sous-jacent au désir de vengeance. Un processus en cause dans la contagion des conflits lors de conflits entre groupes. Si le processus neurobiologique qui implique l’ocytocine puis cette activation du cortex préfrontal semble caractéristique, les motivations apparaissent multiples : se sentir menacé, solidaire, ressentir de l'empathie, « avoir la pression », autant de situations dans lesquelles l’ocytocine a déjà été impliquée.
Source: eLife Mar 3, 2020 doi: 10.7554/eLife.52014 A neurobiological association of revenge propensity during intergroup conflict
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