La sagesse n’est pas seulement une question d’âge souligne cette étude de psychologues de l’Oregon State University (OSU). Elle se façonne principalement par les réponses que nous apportons, face aux événements difficiles de la vie, comme le décès d’un proche ou un divorce. Et tout dépend de cette réponse, chez certaines personnes une grande difficulté entraîne peu ou pas de questionnement sur le sens de la vie, chez d’autres, c’est une remise en question et « tout un travail » face à l'adversité qui permet le développement d'une nouvelle sagesse. Des conclusions, présentées dans les Journals of Gerontology Series B qui suggèrent de « prendre » ces difficultés comme un « catalyseur » pour des jours meilleurs.
Ainsi, pour de nombreux sujets, un événement difficile perturbe la raison d’être et soulève des questions sur la compréhension de la vie et du monde. « Cette profonde remise en question permet le développement d'une nouvelle sagesse », explique Carolyn Aldwin, directrice du Centre de recherche sur le vieillissement de l'OSU. « La sagesse vient avec l'âge » n’est pas le bon adage, en revanche les efforts et les difficultés rencontrées pour régler les problèmes après un événement difficile sont de nature à apporter une nouvelle vision de la vie.
L’étude a tenté de mieux comprendre comment la sagesse se développe dans le contexte de l'adversité comme la mort d'un être cher, le divorce, un gros problème de santé ou la perte d'emploi. Comprendre comment les gens font face à l'adversité et progressent vers la sagesse donne un aperçu du vieillissement en santé, expliquent les auteurs. Les chercheurs ont mené des entrevues avec 50 adultes, âgés de 56 à 91 ans qui avaient vécu un ou plusieurs événements difficiles. Les participants ont été invités à se concentrer sur un événement difficile et à décrire comment ils ont fait face et comment l'expérience a modifié leurs perspectives de vie.
Un événement difficile entraine une réponse forte et immédiate : la première conclusion qui ressort de ces entretiens est l’immédiateté de la réponse des participants lorsqu’on leur demande de réfléchir à un événement difficile, en particulier, de leur vie. Ces périodes de difficulté sont l’une des façons dont la plupart des gens se définissent. Ici, sur les 50 répondants,
- chez 13 d’entre eux, l'événement difficile n’a conduit qu’à peu ou pas de questionnement sur le sens de la vie ;
- chez les autres participants, l’événement difficile a mobilisé l’intelligence, la maîtrise de soi et la planification pour résoudre les problèmes liés à cet événement ;
- 5 participants ont indiqué que l'événement difficile les a aidés à clarifier une valeur ou une croyance spécifique ;
- 32 participants ont indiqué que l'événement difficile a entraîné une remise en cause personnelle, une réflexion sur soi-même, une remise en question des croyances fondamentales et de la vision du monde.
L'environnement social façonne la réponse aux événements difficiles de la vie : il est clair, et confirmé par ces entrevues, que l'aide des proches pendant une période difficile, le soutien émotionnel non sollicité, le soutien par des « homologues » qui traversent la même adversité, le conseil d'experts, les nouvelles rencontres etc… ont une influence sur la capacité à répondre à ces événements de la vie. Ces soutiens sociaux et ces interactions sont même décrits par certains sujets comme des facteurs directs de développement de la sagesse, autour de la compassion et de l'humilité, par exemple. Ainsi, se rapprocher d'autres personnes ayant des expériences similaires a permis à certains de développer un nouveau sens de soi et une nouvelle vision de l’avenir.
S'adapter ou « grandir ? Les chercheurs observent les deux comportements. Certains participants vont réussir à s’adapter très vite et vont retourner à leur « vie d’avant », d’autres se remettent en question, « grandissent » et changent de comportement ou de vie après l'événement. Encore une fois, les interactions sociales sont souvent déterminantes et font la différence.
Mieux comprendre ce cheminement face à l’adversité, en particulier chez les personnes âgées permet de favoriser un vieillissement en bonne santé. Par le soutien social, par exemple, ou toutes intervenions qui permettent au sujet d’ « utiliser » l’adversité comme le catalyseur d’une « nouvelle » sagesse. En pratique, avec le vieillissement des populations, le défi reste de de s'assurer que les gens ont accès aux soutiens sociaux dont ils ont besoin pour faire face aux difficultés de la vie.
Source: The Journals of Gerontology Series B 07 February 2018 DOI: 10.1093/geronb/gby002 The Development of Wisdom: A Social Ecological Approach
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