« Les aliments agissent sur notre cerveau comme le font les composés pharmaceutiques » a déclaré Fernando Gómez-Pinilla, un professeur de neurochirurgie qui a passé des années à étudier les effets de l’alimentation, de l’exercice et du sommeil sur le cerveau. Pour lui, il n’y a pas l’ombre d’un doute : les aliments ont le potentiel d’influer positivement sur la santé du cerveau et sur les fonctions cognitives qui lui sont associées. C’est plus particulièrement le cas des acides gras oméga-3 qu’on trouve dans les poissons gras et les noix, et qui constituent les membranes cellulaires du cerveau humain.
Pourtant, en dépit de ce rôle décisif, l’organisme n’est pas capable de les synthétiser. Ces acides oméga-3 doivent donc nécessairement venir de l’alimentation et c’est la raison pour laquelle on dit que ce sont des acides gras essentiels. D’autant que les bienfaits des oméga-3 ne s’arrêtent pas à la constitution des neurones : ils influent sur de nombreux mécanismes physiologiques du corps humain…
Quels sont les différents types d’acides gras oméga-3 ? On compte 3 types d’acides gras oméga-3 :
- l’acide acide alpha-linolénique (AAL),
- l’acide eicosapentaénoïque (AEP),
- et l’acide docosahexaénoïque (ADH).
- L’acide acide alpha-linolénique (AAL) est le chef de fil des oméga-3. On le trouve essentiellement dans des aliments d’origine végétale. Il est converti plus ou moins efficacement par l’organisme en AEP, puis en ADH, les deux autres formes d’oméga-3 connues.
- L’acide eicosapentaénoïque (AEP) est synthétisé par l’organisme à partir de l’AAL avec un taux de conversion très faible. L’AEP est présent dans les produits marins, en particulier les poissons gras comme le saumon ou le maquereau.
- L’acide docosahexaénoïque (ADH) est présent également dans les produits marins. Bien qu’il soit essentiel au développement du cerveau et de la rétine, ainsi qu’à la formation et la motilité des spermatozoïdes, l’ADH semble avoir des propriétés anti-inflammatoires moins importantes que l’AEP.
Quels sont les bienfaits des oméga-3 sur la santé ? Les acides gras oméga-3 procurent de nombreux bienfaits sur le plan cérébral, optimisent l’apprentissage et la mémoire et participent à la prévention de troubles mentaux comme la dépression, la démence, les troubles bipolaires ou la dyslexie.
Renforcer la plasticité synaptique est leur principal bénéfice : les oméga-3 renforcent cette capacité des neurones à se connecter entre eux et qui permet d’expliquer l’existence de nombreuses formes de mémoire dans le système nerveux. Ils réduisent également le stress oxydatif qui affecte particulièrement les cellules du cerveau.
Réduire la réponse inflammatoire : de récentes études montrent que les oméga-3 peuvent également contribuer à réduire les réactions inflammatoires. Ces mécanismes de défense sont utiles pour combattre les infections mais deviennent néfastes en l’absence de danger réel comme en cas de réponse auto-immune. Les acides gras oméga-3 auraient ainsi la capacité d’augmenter l’autophagie chez les macrophages, ces cellules de l’immunité impliquées dans les phénomènes inflammatoires, et de réduire la sécrétion de certains facteurs (comme le CXCL-10) responsables de l’amplification de la réponse inflammatoire.
Lutter contre le vieillissement : d’autres études révèlent qu’en réduisant certains marqueurs de l’inflammation, ils permettraient de préserver la taille des télomères, ces sections spécialisées de l'ADN, des « capuchons des protection » qui permettent la copie fidèle des chromosomes pendant la division cellulaire. Le raccourcissement des télomères a été associé au cancer et aux maladies cardiaques, au déclin cognitif, au vieillissement et au décès prématuré ; des télomères plus longs à une espérance de vie plus élevée.
La liste de leurs effets bénéfiques semble aussi longue que le nombre de cascades moléculaires induites, susceptibles d’affecter des mécanismes très différents du corps humain. De nombreuses études ont ainsi mis en évidence leurs effets favorables vis-à-vis de la tension artérielle, de l’élasticité des vaisseaux, des réactions immunitaires et de l’agrégation des plaquettes sanguines. Autant de bénéfices possibles à portée de main à condition de veiller à réduire les apports en oméga-6 qui parasitent l’utilisation des oméga-3 par le corps humain. En effet, les oméga-3 et les oméga-6 entrent en compétition pour plusieurs enzymes : si les apports en oméga-6 sont trop importants, comme c’est le cas dans les pays occidentaux, les rares oméga-3 apportés par l’alimentation sont sous-exploités.
Le bon rapport oméga-6/oméga-3 : on estime que le rapport oméga-6/oméga-3 dans les régimes occidentaux est d’environ 20/1, alors qu'il devrait idéalement se situer entre 1/1 et 4/1.
Il s’agit donc d’augmenter les apports en oméga-3 (suppléments, aliments d’origine marine, graines et noix) tout en réduisant les apports en oméga-6 (huiles hydrogénées, huiles de tournesol, plats préparés, produits ultratransformés).
Références
1. Gómez-Pinilla et al. Brain foods: the effects of nutrients on brain function. Nature Reviews Neuroscience, 2008; 9 (7): 568
2. Jennifer Mildenberger, Ida Johansson, Ismail Sergin, Eli Kjøbli, Jan Kristian Damås, Babak Razani, Trude Helen Flo, Geir Bjørkøy. N-3 PUFAs induce inflammatory tolerance by formation of KEAP1-containing SQSTM1/p62-bodies and activation of NFE2L2. Autophagy, 2017; 00
3. Janice K. Kiecolt-Glaser, Martha A. Belury, Rebecca Andridge, William B. Malarkey, Beom Seuk Hwang, Ronald Glaser. Omega-3 supplementation lowers inflammation in healthy middle-aged and older adults: A randomized controlled trial. Brain, Behavior, and Immunity, 2012; 26 (6): 988